mardi 28 juillet 2015

Lettres ouvertes pour alerter sur les dangers du projet de réforme des diplômes

Madame Monsieur,

L’annonce d’une reconfiguration en profondeur des métiers sociaux dans notre pays suscite bien des critiques et controverses. Loin de tout corporatisme, plusieurs organisations de professionnels directement concernés se mobilisent actuellement pour faire connaître leur point de vue, leurs exigences et leurs propositions. Ce qui ne semble ni facile ni bien compris par les décideurs.
En soutien à leurs efforts pour que s’ouvre un large débat démocratique sur tous ces sujets, il est apparu nécessaire à un certain nombre d’enseignants universitaires, de formateurs et de chercheurs, tous liés au travail social, d’alerter les autorités publiques et les groupements partenaires sur les dangers de la réforme annoncée.

Vous trouverez ci-après une lettre ouverte argumentée de défense des métiers sociaux avec ses trente-huit premiers signataires. D’autres suivront et la presse en sera informée.

Restant à votre disposition, nous vous prions de croire, Madame, Monsieur, à nos très sincères salutations.
 
Les premiers signataires
defendrelesmetierssociaux@gmail.com 

La suite ici + signatures : http://m.anas.fr/38-chercheurs-formateurs-et-professionnels-adressent-une-lettre-ouverte-pour-alerter-sur-les-dangers-du-projet-de_a935.html

mardi 14 juillet 2015

Rézo n°3 - Sommaire

Rézo social 93 - numéro 3 :
- Édito
- Les raisons de la colère
- Infos juridiques : le droit de grève (1/2)

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lundi 13 juillet 2015

Rézo n°3 - Edito



Dialogue social (de sourds)
Le 25 juin, à l’issue d’une journée de manifestations réunissant les salarié-es des secteurs sanitaires et sociaux dans 80 villes de France, dont plus de quatre mille personnes à Paris, l’intersyndicale CGT, FO et SUD a été reçue par Mme Christine Dardel, conseillère auprès de Mme Marisol Touraine.

Après un tour d’horizon fait par les représentants syndicaux sur l’état des lieux de nos secteurs, de l’insupportable pression vécue sur le terrain par les salarié-es, nous n’avons eu pour toute réponse que du déni.

Que les secteurs sanitaires publics et privés non lucratifs, sociaux et médico-sociaux associatifs soient en lente déliquescence, que les dépressions et suicides chez les professionnel-les soient en augmentation, déni.

Que les soins, l’accompagnement se dégradent au détriment des usager-ères et des résident-es, déni.

La baisse de l’espérance de vie de la population, l’augmentation de la mortalité maternelle périnatale, la surmortalité de la grippe cet hiver… ne sont-elles que fantasmes de représentants syndicaux ? Que les attaques sur les 35 heures dans les établissements soient une insupportable goutte d’eau pour les personnels, que la refonte des métiers conduise à une perte d’aptitudes professionnelles ne sont-elles que lubies pour les représentants du personnel ?

C’est pourtant l’avis du cabinet du ministère en tout cas, pour elle et eux nous ne sommes que des « nostalgiques » du passé alors qu’elle et eux restructurent pour notre bien, réorganisent nos façons de travailler pour nous rendre plus efficient-es… et nous enseignent la « bientraitance » comme une insulte jetée au visage des formateurs et formatrices des instituts professionnels et en jetant l’opprobre sur l’ensemble des personnels.

Ce n’est en rien du dialogue social, c’est du dialogue de sourds.

Pour SUD et ses partenaires dans la mobilisation, il va falloir substituer au pseudo dialogue social cher au ministère une négociation à la façon syndicale, sous la pression d’un rapport de force que nous construirons pour l’automne de nature à faire prendre conscience à nos gouvernants de la réalité.

dimanche 12 juillet 2015

Rézo n°3 - Les raisons de la colere



À l’appel de plusieurs organisations syndicales et de collectifs de lutte, des milliers de travailleurs sociaux se sont mis en grève le 25 juin dernier. C’est l’ensemble du secteur social qui est descendu dans les rues à Paris, Marseille, Bordeaux, Lyon… De notre côté, nous avons bien entendu pris part à la mobilisation. Sur les boites du 93 où nous sommes implantés des Assemblées Générales ont fleuri, des tracts ont été massivement diffusés pour alerter les différentes équipes professionnelles. Au cours de ces nombreux échanges, des espaces de paroles se sont créés pour  dénoncer la casse du social et appeler à battre le pavé. Les travailleurs sociaux du 93 ont répondu en nombre à l’appel.
Rézo est allé à la rencontre d’une petite dizaine d’entre eux pour relayer leurs colères et leurs revendications autour d’une question unique : « pourquoi es-tu en grève aujourd’hui ? »

« Ça tombe très bien que l’ensemble des travailleurs sociaux, éducateurs et le monde hospitalier convergent sur un mouvement de lutte d’autant plus que ça fait un certain nombre d’années qu’on voit les choses se dégrader dans nos métiers. Là, avec Avenir Educs, on s’est mobilisé il y a un an et demi pour contrer une refonte des métiers. L'UNAFORIS (Union Nationale des Associations de FOrmation et de Recherche en Intervention Sociale) et la CPC (Commissions Professionnelles Consultatives une instance rattachée aux ministères qui établit les critères de formations pour les différents métiers) veulent supprimer le métier d’éducateur spécialisé, d’assistante sociale, d’éducateur de jeunes enfants. Pour en faire une espèce d’amalgame complètement hétéroclite avec un travailleur social technocrate qui sera en mesure d’être dans de la gestion et pas dans de la relation humaine. Nous ce qu’on revendique, c’est des formations professionnelles qualifiantes et qui permettent aux éducateurs, aux assistantes sociales de continuer leur travail de relations avec des hommes et des femmes en difficultés. C’est pour ça qu’on est en grève aujourd’hui, c’est pour être debout pour nos métiers et surtout pour permettre aux étudiants de continuer à se former correctement à un métier de l’ accompagnement et pas un métier de la gestion du social».

« Je suis en fin de carrière à la veille de ma retraite et donc c’est un moment où l’on réfléchit beaucoup à son parcours. Pourquoi on s’est engagé dans le travail social et éducatif. Je repense à mon passé d’éducatrice ; j’ai aussi été autant de temps directrice d’établissement et formatrice. Au cours de ces trois périodes de ma vie professionnelle, la seule chose qui m’a toujours mobilisée malgré les hauts, les bas, les crises, les problèmes, c’était l’engagement qu’on peut avoir par rapport à des publics, c’était ce qu’on soutenait et ce qu’on défendait pour un monde moins dur, plus juste, avec aussi, il est vrai beaucoup d’utopie parfois. Je n’ai jamais renoncé à ce qui me tenait à cœur et je ne me retrouve pas dans le profil des travailleurs sociaux qu’on est en train de préparer pour plus tard. Il faut bouger, il faut changer, certes, mais il ne faut pas casser les métiers ».

« C’est pour manifester contre toutes les lois qui sont  actuellement en débat pour la refonte des métiers du social, pour la remise en cause des diplômes du secteur. Il y a une offensive qui est en train de s’orchestrer entre les organisations patronales pour emmener à la casse le travail social.
Mes craintes, elles sont multiples. C’est le social au rabais, c’est de voir disparaitre effectivement tout le service digne de ce nom que le social et le sanitaire peuvent offrir à la population. C’est également de voir se marchandiser les missions de services publics et ça, ce n’est pas acceptable ! »

« Je suis salarié sous la convention collective 66 qui va vraisemblablement être modifiée par les syndicats  employeurs. Leurs projets vont à l’encontre de certains acquis nous garantissant de bonnes conditions de travail auprès des personnes qu’on accompagne.  On a besoin  d’avoir des congés et plus particulièrement les congés trimestriels qui risquent à un moment donné de disparaitre. Et ce n’est vraiment pas du luxe, car on fait un métier où l’on a besoin de se reposer. On fait un métier qui demande beaucoup d’énergie psychique. C’est important de pouvoir conserver ces congés là !
Au niveau des métiers aussi, je m’inquiète par rapport à la classification et à la disparition des métiers aux profits des compétences. La formation va aussi être modifiée ; si je suis là aujourd’hui, en premier lieu, c’est pour les personnes, c’est pour les enfants dont je m'occupe à la protection de l'enfance. Qui  va en pâtir au bout du compte? Ce sont les publics accompagnés puisque la qualité du travail sera amoindrie. Déjà que c’est de plus en plus compliqué de faire un travail de qualité. On doit être exigeant par rapport aux personnes qui sont en difficultés et tout ce qui est en train de se réaliser va à l’encontre de la qualité du travail. C’est ce que j’ai toujours défendu et c’est pour ça que je suis en grève aujourd’hui ! Il faut continuer à se mobiliser pour les familles et les enfants. »




« Pour lutter contre la casse de la convention collective et la refonte des métiers du social parce que je pense que s’il y a plusieurs métiers du social ce n’est pas pour rien. Il y a une base réelle à chaque métier et là, on est train d’essayer d’inventer un mix de tout, au rabais bien sûr ! Il ne faut  surtout pas qu’on perde tous nos acquis. C’est pareil pour les conventions collectives, l’idée d’une convention unique (ndlr : impulsée par le patronat) ce n’est pas pour avoir plus d’avantages, mais pour une convention au rabais. On fait un métier suffisamment difficile pour ne pas en plus n’avoir aucun droit ! »


 « Je suis en grève aujourd’hui pour plusieurs raisons. Déjà pour des raisons qui concernent les éducateurs pour la défense des conditions de travail, pour le maintien de la convention 66, mais également pour tout ce qui se passe en ce moment avec les réformes qui affectent les jeunes qu’on accompagne. Je suis en grève aussi aujourd’hui contre les politiques d’austérité qui dépassent largement notre secteur professionnel. Pour la défense de tous les services publics, que ce soit les hôpitaux, la santé, le social… Et plus globalement par rapport à tous les salarié-e concerné-es par les reculs de nos acquis.  Sur ma boite, qui est composée de petites structures, la grève a bien pris puisqu’environ 50 % des collègues ont pris part à l’action. C’est vraiment pas mal pour la suite ! »


« Si je suis en grève aujourd’hui, c’est par rapport à la  braderie du secteur social. Au-delà de la refonte des métiers, de la remise en cause des acquis conventionnels, c’est vraiment tout le secteur qui subit une offensive  généralisée. Sur le terrain,  l’austérité se traduit par des postes non remplacés et des équipes en difficultés qui n’arrivent plus à rendre un service de qualité. C’est également une précarité budgétaire renforcée. Par exemple pour certaines structures financées par le département, les durées des conventions sont revues à la baisse. Au lieu d’établir des conventions sur 3 ans qui permettaient d’assurer une certaine stabilité financière, on arrive à des appels à projets annuels. La mise en concurrence devient la norme. Forcément, ça se répercute sur les salarié-es en terme d’objectifs à atteindre pour maintenir la boite à flot. Au final, ce sont encore les usager-es qui vont trinquer, car cette logique de chiffres risque de se traduire par une exclusion des publics les plus en difficultés. C’est une perte totale de sens et des valeurs de nos métiers. Face à ces politiques d’austérité, c’est tout le social qui doit se réveiller pour éviter la marchandisation et la dégradation de nos services respectifs »




samedi 11 juillet 2015

Rézo n°3 - Infos juridiques : le droit de grève (1/2)



http://www.dailymotion.com/video/xegq9h_greve-generale-expression-directe-s_news
Définition : La grève est un arrêt de travail collectif, par décision concertée, dans le but de faire aboutir des revendications.

Le recours à la grève nécessite donc l’existence de revendications professionnelles et que celles-ci aient été portées à la connaissance de l’employeur avant ou lors du dépôt du « mot d’ordre de grève » remis à la direction par les organisations syndicales (OS), voire, pour le secteur privé en l’absence d’OS par le collectif de salarié-es qui en a décidé.

Dans le cas d’une grève au niveau national, l’employeur doit voir la copie du tract national d’appel à la grève simultanément à la diffusion du tract aux salarié-es de l’entreprise, comme c’est le cas pour tout affichage ou diffusion de tracts à l’intérieur de l’entreprise. Mais il faut savoir qu’une grève surprise peut être déclenchée sans aucun préavis dans le secteur privé. Ce peut être le cas lorsqu’un problème grave se pose de façon  inopinée, comme une décision unilatérale de l’employeur remettant en cause des acquis ou lorsque les conditions de travail se dégradent, la grève étant le moyen de dire « stop ». Ou encore lors du blocage de négociations, la grève devenant l’ultime recours.

Le droit de grève est un droit constitutionnel énoncé dans le préambule de la constitution de 1946 auquel renvoie la constitution de 1956. Il fait ainsi partie des droits fondamentaux définis par la constitution, avec cette précision écrite dans le préambule « le droit de grève s’exerce dans le cadre des lois qui le réglementent ».

Dans le secteur public, le droit de grève est très réglementé et codifié dans le code du travail aux articles L. 2512-1 et suivants.

· Nécessité d’un préavis déposé par une ou des organisations syndicales représentatives au niveau national, dans la catégorie professionnelle ou dans l’entreprise ou le service concerné.
· Ce préavis précise les motifs du recours à la grève et doit parvenir à la direction 5 jours francs avant le début de la grève. Il doit mentionner  le champ géographique et professionnel, l’heure de début ainsi que sa durée, limitée ou non.
· De plus, pendant la durée du préavis, les parties intéressées sont tenues de négocier.

Dans le privé, différentes lois protectrices pour les salarié-es, de 1950 à 2007, ont été codifiées dans le code du travail aux articles L.2511-1 et suivants :

· Interdiction de sanctionner pour fait de grève sauf en cas de faute lourde, interdiction pour l’employeur de licencier, le licenciement serait alors nul de plein droit.
· interdiction de mesures discriminatoires en matière de salaire (rémunération,  avancement, prime…) comme par exemple une prime attribuée aux seul-es salarié-es non grévistes (cf. Cour de Cassation du 1er juin 2010).
· Interdiction d’embaucher des personnes en CDD ou des intérimaires pour remplacer les grévistes.

En l’absence de toutes autres dispositions législatives, c’est le Conseil d’Etat et la Cour de cassation qui ont apporté des limites au droit de grève, sur lesquelles nous reviendrons dans le « Rézo n°4 ». Nous apporterons aussi des éléments de débat sur la pratique.